La Maison Rubens présente le Tintoret de David Bowie

C’est avec une grande fierté que la Maison Rubens présente aujourd’hui le Tintoret qui a appartenu à David Bowie. La Sainte Catherine du peintre Vénitien Jacopo Tintoretto (1518-1594) appartenu pendant plus de 30 ans à l’icône de la musique pop. Après le décès de Bowie en 2016, son exceptionnelle collection d’art est mise en vente le 10 novembre de la même année par la maison de ventes aux enchères londonienne Sotheby’s. Cette collection d’œuvres d’art moderne et contemporaine de Frank Auerbach, Jean-Michel Basquiat, Damien Hirst et consort, révèle une surprise : une toile du maître ancien Jacopo Le Tintoret.

Tout comme Rubens, Bowie nourrissait une grande admiration pour l’artiste vénitien. Non content de s’inspirer des toiles du Tintoret, Rubens en possédait sept dans sa collection personnelle. Le monumental retable de Sainte Catherine daté des années 1560 est acheté par un collectionneur privé qui - quelques minutes à peine après la vente aux enchères - annonce à la presse internationale son intention de confier le tableau en prêt de longue durée à la Maison Rubens, "un musée que Bowie adorait".Ce que Bowie n’a jamais su, c’est que sous la couche de peinture se cache une ébauche qui souligne encore le génie du peintre. Ce dessin a récemment été découvert lors d’un examen technique de la toile à l’Institut Royal du Patrimoine artistique qui a permis d’établir que l’œuvre a une décennie de plus que l’on avait cru. Il montre comment Le Tintoret a élaboré la composition de sa toile et l’a modifiée au gré de son travail. La Fondation Colnaghi publie en octobre en collaboration avec la Maison Rubens un ouvrage scientifique sur Le Tintoret, Rubens et Bowie auquel des spécialistes du monde entier ont apporté leur contribution. Le Ministre flamand du Tourisme Ben Weyts est si impressionné par toute l’affaire qu’il décide de soutenir le projet embryonnaire de renvoi temporaire de l’œuvre à Venise, où le retable du Tintoret sera exposé pendant la Biennale. Et il sera entouré de quantité de maîtres flamands que Le Tintoret admirait.

“Le don que vous fait un grand tableau : il est là pour être admiré, pour vous élever l’âme, vous communiquer l’espoir et la beauté, sans rien demander en échange.” Cette étonnante remarque aurait pu être de Pierre Peter Paul Rubens, peintre et collectionneur passionné. La citation est pourtant de David Bowie, mort près de 400 ans plus tard. Célèbre star de la musique pop, collectionneur et grand admirateur de Rubens. À la question “si vous pouviez inventer une drogue, quel serait son effet?”, Bowie répondit ceci : “Une injection d’affection. De préférence de ma petite fille de trois ans, à cet âge, si bref, où un enfant vous embrasse avec toute sa force et conviction, un moment d’amour pur qui ne demande rien en échange. Le genre de don que vous fait un grand tableau : il est là pour être admiré, pour vous élever l’âme, vous communiquer l’espoir et la beauté, sans rien demander en échange [1].” On ne pouvait imaginer meilleure image pour formuler les points de convergence entre Rubens et Bowie, deux artistes aux multiples talents, brillants, mus par leur passion de l’art et l’amour de leur famille.

Le Tintoret, vu par Rubens et Van Dyck et acheté par Bowie

Le Tintoret peint le retable Sainte Catherine vers 1560–1570 pour l’église San Geminiano de la place Saint-Marc. Cette petite mais prestigieuse église de l’architecte Jacopo Sansovino était déjà renommée à la Renaissance pour son exceptionnel intérieur et ses œuvres de Giovanni Bellini, Paolo Véronèse et Le Tintoret. Rubens eut certainement eu l’occasion de l’admirer et son célèbre élève Anthony Van Dyck en fit un croquis. Le maître vénitien fut du reste une importante source d’inspiration pour l’un comme pour l’autre. Rubens s’est inspiré des inventions du Tintoret à la fin de sa carrière.

Le retable de Sainte Catherine resta dans la même église jusqu’à sa démolition en 1807 sous Napoléon puis, après un bref passage à la Galleria dell’ Accademia, le tableau passa dans les mains de collectionneurs particuliers. David Bowie l’avait acheté il y a 30 ans au marchand d’art londonien Colnaghi. Bowie était en fait tellement fasciné par le peintre vénitien qu’il donna son nom à son label.

Une ‘brillante visite’ à Anvers

Désormais, c’est la Maison Rubens qui exposera la toile grâce à un prêt à longue durée, une politique que mène le musée depuis quelque temps déjà. À l’étranger, ce n’est pas nouveau, mais en Belgique, la Maison Rubens fait figure de pionnier en la matière. Le don d’œuvres d’art a le vent en poupe. Et ce prêt à longue durée permet au musée d’étoffer l’histoire de sa propre collection. La toile du Tintoret, objet de cette ‘brillante visite’, sera donc intégrée à la présentation permanente du musée. Après près de dix ans de travail intensif en vue d’obtenir des prêts à longue durée, la stratégie de la Maison Rubens commence à porter ses fruits.

L’ébauche

Le Tintoret de David Bowie se trouvait il y a encore quelques jours à l’Institut Royal du Patrimoine artistique (IRP) à Bruxelles, où le retable a été soumis à une étude technique sur demande du propriétaire, de la Maison Rubens et de la Fondation Colnaghi. Sous la direction de Christina Currie, les spécialistes ont découvert par radiographie et réflectographie infra-rouge une ébauche exceptionnelle de spontanéité et de virtuosité sous les couches de peinture. Cette ébauche ne révèle pas seulement la manière dont le peintre a élaboré sa composition. Elle permet aussi d’attribuer et de dater précisément l’œuvre d’art. En la comparant en effet avec d’autres exemples dans l’œuvre du Tintoret, le tableau peut être daté une décennie plus tôt qu’on le pensait à l’origine. L’ébauche est en effet pratiquement identique à celle de la princesse sur la toile du Tintoret à la National Gallery de Londres Saint Georges et le dragon. Elle révèle également que Le Tintoret ne cessait de modifier sa composition en cours de travail. En témoignent les nombreux repentirs, des corrections à la peinture mises au jour par l’étude technique de la toile. Cette étude a également montré que l’œuvre tout entière est de la main de l’artiste vénitien. Elle se poursuivra cette année avec l’examen des nuages et des éléments architecturaux. Les conclusions de l’étude seront publiées dans le Bulletin de l’Institut Royal du Patrimoine artistique et le Colnaghi Studies Journal.

La publication

La Fondation Colnaghi publie en octobre de cette année un ouvrage scientifique sur la toile du Tintoret que possédait David Bowie. Le livre David Bowie’s Tintoretto. Angel fortelling Saint Catherine of Alexandria of her Martyrdom inclut des essais de Dr. Stijn Alsteens, Matt Collings, Dr. Christina Currie, Nicholas Hall, Dr. Jeremy Howard, Dr. Riccardo Lattuada, Maja Neerman, John Juilletus Norwich, Dr. Xavier Salomon, Serge Simonart et Ben de Beneden. L’ouvrage s’intéresse également à la Venise du quinzième siècle, à l’histoire mouvementée de la petite église de la place Saint-Marc, à Maerten de Vos, Rubens, Van Dyck et Bowie le collectionneur.

La Fondation Colnaghi est une fondation indépendante qui promeut les œuvres de maîtres anciens auprès d’un large public. Collaborant avec des experts internationaux, des musées et des collectionneurs, elle fait appel à divers médias pour mener à bien sa mission, qui est de montrer toutes les facettes passionnantes de l’art. Le fait que la toile a appartenu pendant des années à une des plus grandes stars de la musique pop de tous les temps montre que l’art ancien continue à inspirer des artistes de premier plan, aujourd’hui comme hier.

De retour à Venise

Le Tintoret peint sa Sainte Catherine pour l’autel de la Scuola di Santa Caterina en l’église de San Geminiano sur la place Saint-Marc, où le retable fut admiré jusqu’à la démolition de l’église en 1807, après quoi il disparut dans le circuit de la collection privée.

À l’annonce de la venue du tableau dans son institution en novembre 2016, Ben de Beneden, le directeur de la Maison Rubens, a élaboré en étroite collaboration avec la Fondation Colnaghi le projet de renvoyer temporairement le retable du Tintoret à Venise pour la Biennale de 2019. Lorsque le Ministre du Tourisme Ben Weyts a été informé du projet, il a immédiatement décidé de le soutenir. Grâce à Toerisme Vlaanderen, le tableau sera donc en 2019 la pièce maîtresse d’une exposition sur l’église San Geminiano et les œuvres d’art qu’elle abritait. L’exposition sera complétée de vues d’Antonio Canaletto et de Francesco Guardi sur lesquelles figure l’église sur la place Saint-Marc. L’exposition inclura aussi des toiles de maîtres flamands comme Rubens, Van Dyck et Maerten de Vos provenant de nos propres musées. Le lien entre les peintres flamands et l’art vénitien est loin d’être anodin. Les Flamands s’imprégnaient de l’héritage italien lors de voyages en Italie et grâce à la diffusion de gravures. Quelques œuvres vénitiennes provenant de musées flamands comme le Musée des Beaux-Arts d’Anvers seront à nouveau exposées à la Cité des Doges en 2019. Le Ministre Ben Weyts est particulièrement enthousiaste à propos du retour temporaire du retable du Tintoret : “Ce projet n’est pas uniquement une belle occasion de montrer l’œuvre du Tintoret aux Vénitiens pendant la Biennale. C’est aussi une chance unique de faire connaître nos Maîtres flamands à l’endroit même où ils s’inspiraient des peintres italiens et du patrimoine antique. J’espère de tout cœur que le projet éveillera l’attention du public sur l’incroyable qualité artistique de notre patrimoine et inspirera un public international à venir l’admirer en Flandre”.

Informations pratiques

Le Tintoret de David Bowie

À partir du 27 juin 2017

Maison Rubens

Wapper 9-11

2000 Anvers

www.rubenshuis.bewww.facebook.com/rubenshuis

8 € / 6 € / gratuit

Ouvert du mardi au dimanche de 10 à 17 heures

Fermé le lundi

Extra

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Découvrez l’étonnante histoire du Tintoret de David Bowie et des autres prêts pendant une visite guidée pour groupes et/ou visiteurs individuels.

Pour groupes

  • Durée : 90 minutes

  • Prix : 75 + 5 € de frais administratifs, exclusif du billet d’entrée au musée

  • Maximum de 15 personnes par guide

  • Réservation : Visit Antwerpen - Booking and Ticketing, tél. +32 3 232 01 03 (en semaine entre 9h00 et 16h00), [email protected]

Pour visiteurs individuels

  • Prix : 10 € (comprend l’entrée au musée)

  • Maximum de 15 personnes par groupe

  • Lieu : Maison Rubens, Wapper 9-11, 2000 Anvers

  • Dates: samedi 8 juillet 2017 de 10h00 à 12h00, dimanche 16 juillet 2017 de 14 à 15h00, samedi 12 août 2017 de 10h00 à 12h00, dimanche 20 août 2017 de 14 à 15h00, dimanche 17 septembre 2017 de 14h30 à16h00, dimanche 24 septembre 2017 de 10h00 à 12h00, dimanche 8 octobre 2017 de 10h00 à 12h00, dimanche 22 octobre 2017 de 10h00 à 12h00

  • Réservation obligatoire : +32 3 201 15 50 (aux heures d’ouverture du musée) ou via [email protected]

Le samedi 5 août 2017, la Nuit du Musée sera entièrement sous le signe de David Bowie et la musique à la Maison Rubens ! Informations sur le site www.rubenshuis.be – billets sur le site www.museumnacht.be

Publication

La publication David Bowie’s Tintoretto. Angel fortelling Saint Catherine of Alexandria of her Martyrdom (Colnaghi Foundation) sera présentée dans le cadre du salon de l’art Frieze London (du 5 au 8 octobre 2017). Elle sera présentée à la Maison Rubens quelques mois plus tard. Les détails seront prochainement communiqués à la presse.

[1] S. Simonart, “Lust for Life, Lust for Art. The Rubens House: a Museum Bowie Loved”, in David Bowie’s Tintoretto. Angel foretelling Saint Catherine of Alexandria of her Martyrdom, London: Colnaghi Foundation, 2017, 154.

Maison Rubens 2017-2021

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Nadia De Vree

Coordinateur de presse, Musées d'Anvers

À propos de Rubenshuis

Le maître vit ici avec des années avec sa famille et peint avec ses collègues et assistants dans l’atelier qu’il a dessiné lui-même. Une partie importante de ses œuvres a été réalisée dans cette maison au cœur d’Anvers.